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Pas d’œcuménisme
sans amour et sans confiance

 

Par Bruno Deledalle,
Président du conseil d’administration
de la Maison d’unité

 

La Maison d’Unité est l’illustration exemplaire de cette double exigence. Bruno Deledalle raconte comment on y vit et on s’y aime !

Nombreux sont les exemples d’une expérience œcuménique vécue fortuitement dans un contexte ou l’amour et la confiance ont joué un rôle éminent et salvateur.

L’auteur de ces lignes membre d’un foyer mixte catholique/protestant vit cette aventure avec bonheur et se réjouit de l’évolution du mouvement œcuménique qui depuis une cinquantaine d’années emprunte les mêmes dispositions intérieures.

Présenter la Maison d’Unité, c’est attester que l’on y vit la même dynamique traversant nos Églises.

Association déclarée (Loi de 1901), la Maison d’Unité est née d’une intuition gouvernée par l’Esprit selon laquelle la vie trinitaire est fondée sur la rencontre des hommes en Christ et la découverte enrichissante au jour le jour de leurs différences.

La différence n’étant plus séparatrice, quoi de mieux que d’offrir aux jeunes particulièrement sensibles au respect de leur identité, et qui entrent dans la vie d’adultes responsables, un parcours découverte sur les chemins de nos diverses traditions chrétiennes.

C’est ainsi que catholiques protestants et orthodoxes peuvent désormais vivre ensemble pour redécouvrir leur propre récit et à quelle espérance commune ils sont tous conviés.

Ce n’est pas le fruit d’un quelconque hasard qui a permis à cette association de prendre son envol. Mais c’est le cheminement fraternel de deux communautés religieuses, l’une catholique « la communauté des sœurs de Sainte Clotilde » située à Paris – l’autre protestante « la communauté des diaconesses de Reuilly » également située à Paris, au travers de leur histoire et de leur proximité géographique leur ayant permis depuis plus d’un siècle de vivre une « mitoyenneté » géographique et spirituelle dans le 12e arrondissement de Paris –  les sœurs catholiques pour avoir accueilli les enfants de la  diaspora orthodoxe au début du siècle dernier – les sœurs  protestantes dans leur combat pour faire reconnaitre dans le monde protestant la valeur de la vie monastique.

Ce sont en effet ces expériences exaltantes et parfois douloureuses qui ont forgé une volonté commune du vivre ensemble.

C’est donc très naturellement que ces deux communautés ont accueilli l’idée d’offrir à des jeunes un  véritable et authentique partage communautaire :

  • humble
  • incarné
  • vécu au jour le jour dans la fidélité en la foi trinitaire.
  • convaincu d’avoir à délivrer et à recevoir un enseignement éclairant la diversité des Églises non dissocié de l’engagement diaconal
  • sans concession concernant le rejet du prosélytisme
  • sans concession concernant l’excès de cléricalisme
  • sans concession concernant la nécessité d’une indépendance vis-à-vis des Églises
  • soucieux d’avoir en revanche le soutien de ces dernières pour ne pas apparaitre comme un foyer d’« électrons libres » cherchant des accommodements  faciles et trompeurs.

Animés de cette conviction, quelques laïcs et religieux convaincus ont mis en place le fonctionnement original de la Maison d’Unité.

Chaque jeune est invité lors de son arrivée à la Maison d’Unité à souscrire personnellement  dès son arrivée à une charte qui lui rappelle son engagement à vivre l’unité au quotidien, dans un lieu de vie dédié (au nombre de neuf actuellement sur Paris et la proche banlieue)  appartenant à des paroisses ou congrégations religieuses de toutes traditions chrétiennes.

Il s’engage en outre à suivre une formation chaque semaine délivrée par des pasteurs prêtres et/ou théologiens appartenant aux diverses facultés, catholiques (Institut catholique de Paris – Centre Sèvres, Faculté jésuites), protestantes (Institut protestant de théologie de Paris  – Faculté évangélique libre de Vaux-sur-Seine) et orthodoxe (Institut Saint-Serge), à participer aux méditations hebdomadaires animées par une communauté chrétienne chaque fois différente et plaçant l’œcuménisme au centre de ses préoccupations et de sa spiritualité.

Formation et prières ont lieu chaque mardi hors vacances scolaires. Sont ainsi offerts successivement et avec grande fidélité les Vêpres orthodoxes, le témoignage des juifs messianiques, la prière de la communauté maronite, anglicane, le témoignage des séminaristes orthodoxes d’Epinay-sous-Sénart, du Groupe biblique universitaire GBU, des Focolari, du Chemin Neuf, de la Communauté de vie chrétienne (CVX), du groupe Hillsong, de l’A.C.A.T.….

Trois fois dans l’année, un « regards croisés » invite théologiens et pasteurs de chacune des confessions chrétiennes à partager sur un sujet le plus souvent voué à controverses. Ainsi parmi les plus clivants a priori ont été abordés sans fard et dans la bienveillance réciproque les thèmes suivants : la Tradition, nos différentes approches de la mort, l’image, la liturgie, la prière, Marie dans les Écritures, la Réforme et les réformes, mais aussi la commémoration de la Réforme, le témoignage chrétien en milieu carcéral, l’originalité du groupe des Dombes, les différentes approches de la déclaration commune sur la doctrine de la justification, la réception du  document de 2013 « Du Conflit à la communion », le retour de nos jeunes témoins au Forum Chrétien francophone à Lyon…

Et ce projet réfléchi et éprouvé depuis près de dix ans maintenant, rejoint totalement le mouvement œcuménique dans son développement le plus récent consistant à promouvoir le consensus différencié et que d’aucun considère même désormais comme différenciant.

Fidèle à la formule d’Esaïe (54, 2-3) : « Élargis l’espace de ta tente, allonge tes cordages, raffermis tes piquets », la Maison d’Unité entend aider ses membres à approfondir sa propre foi dans le regard de l’autre sans renoncement, et sans fermeture, fidèle au paradoxe qui est au cœur de la vie chrétienne. Célébrer notre Dieu un et trine à la fois.

Et de fait les jeunes qui rejoignent la Maison d’Unité réalisent rapidement que la diversité est une chance et non un handicap un acquis et une source d’espérance.

Le formidable et exaltant succès de cette Maison commune a conduit ses initiateurs à en promouvoir la diffusion.

C’est ainsi que la Maison d’Unité a essaimé en province à Lyon sur le même principe : « la vérité vous rendra libre ».

Ils pensent que les béatitudes (Matthieu 5,1-12) sont offertes à tout homme de bonne volonté et constituent le socle commun de vérité à partir duquel nous pouvons nous sentir libres.

Ce discours johannique (Jean 8,37) auquel les jeunes adhèrent avec enthousiasme est une merveilleuse œuvre de l’Esprit qu’il convient d’encourager afin d’en assurer la pérennité.

Et chaque jour les jeunes vivent, pensent et prient « qu’il est bon, qu’il est agréable pour des frères d’habiter unis ensemble » (Ps. 133).

Cela n’a été possible que grâce au travail de nos Églises qui tout au cours de ces cinquante dernières années ont, patiemment et avec persévérance mais selon le désir de Dieu, posé les jalons théologiques et pastoraux nous permettant désormais « le vivre ensemble » et répondu ainsi à l’injonction du Seigneur : « Que tous soient un, comme toi, Père tu es en moi et moi en toi. Qu’ils soient un en nous, eux aussi pour que le monde croie que tu m’as envoyé. » (Jean 17,21).

Puisse les cinquante prochaines années permettre à nos Églises et à de nouvelles Maisons, cellules d’Églises, de poursuivre ce chemin. Que « le partage » puisse devenir chaque jour un peu plus « communion », c’est-à-dire un véritable compagnonnage au sens étymologique du terme.

Que Dieu bénisse la maison d’Unité et ceux qui y vivent chaque jour dans l’amour et la confiance !